Le numérique & moi : un peu, beaucoup, à la folie !
Hallo ! Moi c’est Marguerite.
À mi-chemin entre les « Millennials » et les « GenZ », j’ai grandi avec l’arrivée des réseaux sociaux. Ma présence sur Internet a façonné mon identité, mais comme beaucoup de jeunes de ma génération, j’ai aussi pu tomber dans l’hyperconnexion.
C’est ça qui m’a motivée à créer mon entreprise Digibloom en 2022, alors que je vis à Berlin. Mon objectif : aider chacun.e à trouver un meilleur équilibre dans son usage des écrans.
… Et si l’on questionnait aujourd’hui la place des réseaux sociaux dans notre vie citoyenne ?
Surcharge informationnelle : trouver le temps de penser
71 % des jeunes de 15 à 34 ans s’informent via les réseaux sociaux (Médiamétrie). Les infos sont disponibles en flot continu, 7 j/7, 24 h/24, à portée de poche. Plus que notre cerveau ne peut en traiter. Parfois le soir, je ferme les yeux et j’imagine tourbillonner toutes les infos que j’ai consommées en une journée autour de moi : de quoi est-ce que je me rappelle vraiment ? Nous serions entrés dans l’ère de « l’infobésité ». On ne trouve plus le temps de digérer. Pourtant, une prise de recul est essentielle pour activer notre esprit critique et déchiffrer le vrai du faux là où se glissent régulièrement des fake news.
Jeux d’influence : qui influence qui sur les réseaux ?
Des études ont cherché à identifier ce qui rendait un contenu Internet viral.
La formule idéale : une publication à dimension « morale » ou « émotionnelle » selon les chercheur.e.s (Brady, Gantman & Van Bavel, 2020). Bonus lorsqu’il s’agit d’émotions comme la surprise, la peur, la tristesse, la colère. (Saquete, Zubcoff, Gutiérrez, Martinez-Barco & Fernandez, 2022)
Certains acteurs politiques l’ont bien compris et publient intentionnellement des contenus susceptibles de nous faire réagir de peur ou d’indignation. C‘est une stratégie pour banaliser des propos extrêmes en nous y exposant massivement, souvent à l’aide de « bots » (faux comptes gérés par des robots). Objectif : faire paraître à d’autres que leurs idées sont moins radicales aux yeux de l’opinion publique.
Les algorithmes renforcent indirectement ce phénomène, en nous proposant des contenus similaires à ceux que l’on a déjà visionnés par le passé afin de maintenir notre attention (70 % des contenus visionnés sur YouTube sont des recommandations). Ce phénomène de personnalisation des contenus a été introduit sous le nom de « bulle de filtre » par le militant Eli Pariser en 2011.
Serions-nous condamnés à ne lire que des idées qui confortent ce que l’on pense déjà et à ne discuter qu’avec des gens qui nous ressemblent ?
Des scientifiques comme Gilles Bastin, directeur de la chaire FeedingBias à Grenoble, étudient ce phénomène. Au vu de la littérature récente, l’aspect polarisant des bulles de filtre serait moins important qu’imaginé, même s’il concernerait une partie de la population.
Instagram, X (ex Twitter), Facebook… : des espaces de dialogue démocratiques ?
Si les réseaux sociaux ont l’avantage de sensibiliser et de fédérer autour de grandes causes, il ne faut pas perdre de vue que ces plateformes sont administrées par des entreprises privées dont l’intérêt est avant tout lucratif (contraire à l’intérêt général).
Cela peut donner lieu à des dérives importantes. Vous rappelez-vous du scandale Cambridge Analytica en 2014 ?
Des acteurs politiques avaient alors cherché à influencer les intentions de vote d’internautes en exploitant leurs données personnelles vendues par Facebook.
Par ailleurs, le format même des réseaux sociaux se prête peu au dialogue :
- il existe une asymétrie entre influenceurs et consommateurs plus passifs ;
- les contenus trop politisés sont sanctionnés en visibilité (cf. creator guidelines d’Instagram) ;
- les formats courts reels/shorts/tweets laissent peu de place à la nuance.
Osez sortir de votre bulle !
Sortir de sa bulle, c’est faire un effort conscient pour se confronter à des personnes et des avis différents des nôtres. Pour cela, il est temps d’investir de nouveaux espaces de dialogue :
- entre citoyen.ne.s, expert.e.s, universitaires, politiques, industriels… comme j’ai pu le faire en organisant les débats CitizenCampus à l’Université Grenoble Alpes ou comme le fait l’OFAJ à l’échelle internationale avec Génération Europe ;
- entre citoyen.ne.s européen.ne.s… car les grands défis de société (crise climatique, émergence de l’IA, maintien de la paix…) nécessitent des réponses transnationales.
Dans cette optique, depuis 1963, l’OFAJ favorise les échanges entre les jeunes par-delà les frontières. En soutenant des rencontres et la mobilité internationale, l’OFAJ promeut la compréhension mutuelle et nous invite à changer de perspective au contact de l’autre, souvent en immersion directe (échanges scolaires, Volontariat Franco-Allemand, tables rondes participatives, Parlement Européen des Jeunes…).
Par-dessus tout, ces initiatives nous offrent un cadre bienveillant pour participer au débat, susciter l’intelligence collective et faire l’expérience de la démocratie.
La prise de parole est une compétence qui se travaille. Au début, c’est intimidant et difficile (c’est une introvertie qui vous parle !). Sans l’écran derrière lequel me cacher, parfois je bafouille, je trébuche dans mes mots (surtout en allemand) et je perds mon souffle d’excitation. J’ai souvent plus de questions que de réponses. Puis, il m’arrive souvent de changer d’avis. Mais c’est dans ces moments d’imperfection que se montre notre humanité et se crée l’empathie, élément clé au dialogue démocratique.
Ex-accro aux réseaux sociaux et serial blogueuse, Marguerite s’engage aujourd’hui pour aider chacun.e à introduire un brin de minimalisme à sa vie numérique. Elle est diplômée du master « Techniques, Sciences et Décisions » à Sciences Po Grenoble.